mardi 23 avril 2013

Où s'arrêtera Wikipédia ? (suite et fin)

Avec beaucoup de retard, je viens satisfaire une promesse que j'avais complètement oubliée.

En conclusion de mon article de novembre dernier Où s'arrêtera Wikipédia ? j'annonçais la description prochaine d'une nouvelle évaluation du nombre d'article admissibles sur Wikipédia.

Il s'agirait de proposer une sorte de décompte alternatif à celui d'Emirjp, qui repose avant tout sur une appréciation fondamentale : tant de sujets existent dans l'absolu, tant d'articles doivent leur être consacré. Je m'inscris plus volontiers dans une approche constructiviste. C'est-à-dire que, de mon point-de-vue, est scientifique non pas ce qui existe, mais ce qui a été construit par un raisonnement scientifique et rationnel. Il existe des milliers d'espèces d'insectes non identifiées : même si elles existent dans l'absolu, on ne peut rien écrire sur elles.

Si l'on privilégie cette approche, il est nécessaire de déplacer la focale. Notre référent n'est plus les choses telles qu'elles sont, mais les analyses fiables de ces choses.

Selon une évaluation toute récente, les 7000 revues scientifiques de référence de par le monde publient un million d'articles académiques par an. Ce n'est là qu'une petite portion du savoir humain. Les chercheurs s'expriment aussi par de nombreux autres biais : revues informelles, conférences, thèses etc. Et quantité d'autres personnes sont associées au processus de production des connaissances : ingénieurs, journalistes, bloggers, et même monsieur tout-le-monde (si, si : ce sont des gens comme lui qui ont découvert plusieurs exoplanètes en triant les données du satellite Kepler). Si l'on ne s'en tient qu'à une fourchette basse, la totalité des textes à prétention scientifique véritablement intéressants (car ne nous leurrons pas : il y a du rebut dans le tas) doit représenter une vingtaine de millions par an.

Bien qu'imprécis, ce chiffre est tout de même tangible. Il est beaucoup plus difficile d'évaluer le nombre moyen d'objets inédits découverts ou scientificisés par un travail de recherche. Par exemple, une étude sur des fossiles du permien peut facilement mettre à jour une vingtaine de nouvelles espèces. Inversement, une démonstration mathématique de première ordre peut simplement améliorer un raisonnement déjà appréhendé de longue date.

Je ne pense pas être dans l'erreur complète en établissant que de nombreux travaux de recherche mettent à jour au moins un objet inédit ou ignoré. On aurait donc plusieurs millions d'articles potentiels chaque année. Et encore plus l'année suivante.

En effet, la science s'améliore à vitesse grand v. Chaque chercheur lit deux fois plus d'articles qu'en 1980. Les nouveaux outils de communication et de lecture permettent d'accélérer considérablement le travail de transmission de l'information au sein d'une communauté scientifique. L'automatisation de certaines techniques de recueil et de data mining fait également gagner du temps en évacuant des tâches rébarbatives.

Et il n'y a pas que le progrès technique. La sociologie des sciences évolue radicalement, avec l'arrivée probable de nombreux nouveaux entrants.

En établissant une multiplication par deux du nombre d'articles possibles d'ici la fin du siècle, j'étais certainement en-dessous de la vérité.

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