vendredi 16 septembre 2011

wiki-roman-feuilleton (16/60)

J'avais promis de limiter les incursions de mon feuilleton afin de préserver l'identité proprement wikipédienne de ce blog. Cependant, cet épisode présente un certain nombre d'allusions distordues à l'activité et au foklore de l'encyclopédie en ligne. Enjoy…

Guido Colón était soucieux. Il n’en avait rien laissé paraître à Ramaad afin de ne pas le démotiver. A mesure que le TTGV se rapprochait de Genève, ce masque confiant s’estompait. Il cogitait.
— Quelque chose ne va pas ?
— Non. Enfin, j’espère que non.
— J’espère ?
— Nous ne serons pas forcément aidé. Officiellement, le centre wikipédien de Genève dépend du siège francophone de la Fondation — donc de Paris. En réalité il y a, comment dire, une cabale
Ramaad connaissait ce terme. Il faisait originellement parti du folklore associatif. Puis, avec le temps, il avait pris une ampleur plus inquiétante. Au début des années 30, la Fondation avait même failli éclater sous la pression d’une multitude de ligues occultes (le nom de certaines d’entre elles demeuraient un mystère : que cherchaient au juste les inclusionnistes ?). Une ferme reprise en main s’en était suivie, mais les ligues subsistaient : certaines passaient dans l’underground et connaissaient des fortunes plus ou moins variables (plusieurs rumeurs faisaient état d’une affiliation du trésorier de l’encyclopédie francophone avec la ligue jeune-administrateur) ; d’autres conservaient une mainmise locale : c’était le cas de la cabale romande.

De fait, mener une enquête à Genève n’avait rien d’un travail de routine. Il allait falloir ruser, composer avec une multitude d’acteurs différents (les autorités cantonales, la Fondation, la cabale, d’invisibles ennemis…). L’on ne pouvait vraiment compter que sur soi-même. Dur job.

Le TTGV décélérait. Il pénétrait doucement la Grande Gare Souterraine, qualifiée de GGS ou de Souterraine par les gens pressés. Ramaad tira parti des dernières minutes d’approche pour grignoter un kebab végétarien. En dépit de nombreuses tentatives d’accoutumance, son estomac travaillait mal à des vitesses excédant 500 km/h.

Guido Colón connaissait bien la GGS et ses couloirs à tiroirs. Il prit Ramaad par le bras et le guida comme il guiderait un petit enfant. Ils prirent successivement trois escalators, saisirent deux tapis roulants, traversèrent cinq portes automatiques et attrapèrent le sous-marin qui effectuait la navette entre la GGS et la surface du Lac Léman — un bon raccourci.


Ils étaient à peine arrivé à la surface, qu’un conversant-taxi les héla. Colón déclina cette proposition un peu trop appuyée. Le conversant se permit de répondre (son comportement devait être de tout évidence décalqué sur celui d’un vrai taxi) :
— Vous avez tort. On peut facilement se perdre dans Genève.

Aucun commentaire: